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Les baumes d'Alazia
19 février 2006

L'anorexie dans Le Devoir

J'entre à la Maison de la presse hier en début de soirée, à la recherche d'une bonne revue, d'une lecture de détente. En approchant l'étalage de journaux, mon oeil arrête aussitôt sa trajectoire sur Le Devoir. À la une: L'anorexie frappe au primaire. Un titre qui fesse fort, qui fait mal. Mon coeur se resserre.

Mais en entendre parler de nouveau me soulage. Ça me soulage qu'on ne cesse de vouloir comprendre. Parce que s'il existe une maladie mentale incomprise, c'est bien l'anorexie et les troubles alimentaires en général. La preuve:  l'article mentionne son apparition à un âge de plus en plus précoce. Quand on cesse de vouloir s'alimenter à huit ans, on ne parle plus de symptômes liés exclusivement à l'adolescence. Il faut bien se rendre à l'évidence. La majorité de la population considère l'anorexie mentale comme une obsession de la minceur due aux pressions sociales et aux critères de beauté véhiculés dans la publicité et les revues de mode. Or, l'anorexie, pour moi et je soupçonne pour bien d'autres victimes, trouve son origine ailleurs que dans cette cause facilement identifiable.

Il me contrarie souvent de voir que les gens n'arrivent pas à concevoir que d'autres possibilités existent. Des éléments bien plus complexes que la volonté de maigrir ou le désir de suivre la mode donnent naissance à la maladie et l'entretiennent. En thérapie, on l'associe souvent à un mécanisme de défense, une béquille, au même titre que peuvent l'être l'alcool pour l'alcoolique et la drogue pour le toxicomane. Là où ça se complique, c'est que dans notre cas, on ne peut pas se passer de la nourriture pour vivre. Il faut réapprendre à s'alimenter sainement, à réintégrer cette notion non seulement comme une nécessité, mais aussi comme un plaisir. Il faut dissocier l'utilisation malsaine que l'on a l'habitude d'en faire de celle qu'il est "normal" d'adopter. Manger pour vivre, se gâter, stimuler les hormones, émotions et humeurs versus ne pas manger pour stopper les effets émotifs des montagnes russes hormonales et engourdir la douleur causée par d'autres facteurs, devenir zombie, apathique, contrôler quelque chose quand on a l'impression de ne plus rien contrôler ailleurs. À toutes ces personnes qui croient comprendre, mais qui ne se renseignent pas et qui ne l'ont jamais fait, qui réduisent les causes de l'anorexie à la simple volonté d'être mince et de porter les vêtements dernier cri, je dis : fermez-là! Cessez de croire que vous détenez la vérité sur une réalité que vous n'avez jamais frôlé de près ou de loin ou sur laquelle vous ne vous êtes jamais réellement renseignés. Et écoutez les bonnes personnes. Tendez l'oreille, soyez attentifs et ouverts.

Enfin un article qui ouvrira peut-être les yeux du monde sur ces causes incomprises. Pourquoi arrêter de s'alimenter à huit ans? Pour avoir l'air de la mannequin de quatorze? Ce ne serait pas plutôt par crainte de vieillir, comme le mentionne la journaliste. Et comment expliquer cette crainte dans le monde d'aujourd'hui? Une nouvelle étude voit le jour justement pour revenir sur les causes de l'anorexie, qui n'expliquent plus la problématique telle qu'on la constate maintenant.

On y parle aussi des contrecoups du discours antiobésité. Un sujet qui, heureusement, fait de plus en plus jaser. Quels types de relations sommes-nous susceptibles de développer avec la nourriture quand on nous bombarde de parts et d'autres d'avertissements des dangers de tel ou tel gras, de tel ou tel sucre et ainsi de suite? Qu'en est-il des enfants qui grandissent dans des familles où l'on ne se nourrit que de lait écrémé, de yogourt 0% de M.G. et où l'on base le discours santé sur une culture alimentaire restrictive? D'après vous, la petite (ou le petit) issue d'un tel milieu et devant qui, lors d'une fête d'enfants, on dépose un copieux morceau de gâteau au chocolat sera-t-elle envahie par un sentiment de plaisir ou une vive émotion de crainte?
Merci au journal Le Devoir.

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